Coronavirus : point de situation sanitaire à La Réunion au 9 avril

Communiqué de presse
Covid-19

Un point sanitaire a été réalisé à l’ARS ce 9 avril, sur la situation du Covid-19.
Les sujets abordés : prise en charge ambulatoire, indications de dépistage, dispositif pour les EPHAD, rappel de consignes sur l’utilisation de certains médicaments et la continuité des soins

Sur plus de 356 patients atteints de COVID19  depuis le 11 mars, 154 ont été hospitalisés, alors que plus de la moitié ont été pris en charge en ambulatoire. Les lignes directrices de la prise en charge en ville des patients COVID19 en phase épidémique ont été tracées dans une instruction du ministère en date du 4 avril.
Dans ces circonstances, une réflexion a été partagée entre professionnels de santé libéraux (représentants des URPS médecins, infirmiers, pharmaciens), conseil de l’ordre des médecins, département universitaire de médecine générale, infectiologues du CHU, urgentistes, laboratoires, assurance maladie afin de définir le parcours ambulatoire des patients COVID19 à La Réunion.

Pour qu’un patient puisse être suivi en ville, il ne doit présenter aucun critère de gravité et disposer d’un logement et d’un environnement lui permettant de respecter les consignes de confinement, tout en évitant les contacts avec les autres occupants du logement. La présence de personnes fragiles au sein du même logement constitue un frein à la prise en charge à domicile.

Le suivi des patients à domicile se décline en auto-surveillance, traitement symptomatique, suivi médical, parfois un suivi renforcé au domicile par des infirmiers, ou plus rarement une hospitalisation à domicile (HAD).

Plusieurs dispositifs facilitent le parcours des patients, et les interventions des professionnels de santé de proximité :

  • Une cellule ville-hôpital mise en place par le CHU : les infectiologues, avec le soutien d’internes de médecine générale ou de spécialité font le lien entre l’hôpital et la ville. Leur  expertise est disponible en ligne et par une ligne téléphonique réservée aux médecins traitants avec la possibilité de discuter des décisions thérapeutiques et de  faciliter les hospitalisations en cas de complications.
  • La plateforme territoriale d’appui sera également en soutien des médecins traitants et des partenaires du CHU au moment de la sortie d’hospitalisation, pour organiser et coordonner le parcours des patients en ville.

Pour les patients dont l’état clinique ne nécessite pas une hospitalisation, mais dont les conditions de vie ne permettent pas de respecter les mesures de protection obligatoires, l’ARS en lien avec la préfecture prévoit d’ouvrir un ou des centres d’hébergement pour patients COVID19. Un premier projet qui devrait être effectif dans les prochains jours fait l’objet d’un partenariat avec le CHU et le Conseil Départemental et la Fédération des œuvres sociales de La Réunion.

Ce type de réponse prend en compte les besoins exprimés par les professionnels de santé qu’ils soient libéraux ou hospitaliers, et a vocation à éviter d’occuper inutilement des lits hospitaliers que l’on réserve ainsi aux patients les plus sévères.

Les indications de dépistage du COVID-19 à la Réunion sont le résultat d’un consensus établi par un groupe de professionnels de santé : infectiologues du CHU, DUMG (département universitaire de médecine générale), URPS médecins, infirmiers, pharmaciens, Conseil de l’Ordre départemental des médecins, Conseil de l’ordre inter-régional des médecins, laboratoires de biologie médicale, ARS, Assurance maladie.
L’objectif de ce groupe de travail a été d’élargir les indications de dépistage afin de se donner le maximum de chances d’identifier les cas de contamination : ainsi ont été intégrées de nombreuses indications de dépistage concernant des personnes asymptomatiques. L’exemple phare est celui du dépistage dans les établissements médico-sociaux, où compte tenu du risque de diffusion virale la stratégie de dépistage est très renforcée devant tout cas possible ou confirmé.

Les indications suivantes ont été retenues (à la date du 7 avril 2020) :

Patients fragiles, co-morbides ou à risques présentant un ou plusieurs signes évocateurs de COVID-19

  1. Personnes à risques
    • Personnes âgées de plus de 70 ans
    • Insuffisance rénale chronique dialyse, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV
    • Antécédents cardio-vasculaires : HTA compliquée, AVC, coronaropathie, chirurgie cardiaque,
    • Diabète insulinodépendant non équilibré ou avec complications
    • Pathologie chronique respiratoire
    • Immunodépression congénitale ou acquise
    • Cirrhose
    • Femmes enceintes 3ème trimestre
    • Obésité (IMC>30)
  2. Signes évocateurs
    • Fièvre ou sensation de fièvre
    • Toux habituellement sèche
    • Dyspnée
    • Myalgies
    • Confusion, perte d’équilibre, chute
    • Céphalées
    • Maux de gorge, rhinorrhée, prurit pharyngé
    • Douleur thoracique
    • Diarrhée, nausées ou vomissements
    • Anosmie brutale, agueusie
  • Soignant symptomatique
  • Patient symptomatique avec signes évocateurs de COVID19 : association de 3 ou 2 signes évocateurs (depuis le 6 avril)
  • Soignant asymptomatiques de retour de voyage dans les 15 derniers jours, ou contact d’un patient COVID-19 sans protection. Test à J5.
  • Personne asymptomatique, contact familial d’un  COVID-19+ (à J5).
  • Personne asymptomatique, contact d’un COVID1-9+ et contact étroit avec personne fragile.
  • Personne asymptomatique de retour de voyage dans les 15 derniers jours, et devant travailler avec exposition au public.
  • Entrant en EHPAD ou établissement médico-social. Résident symptomatique en EHPAD et établissement médico-social.
  • Tous les soignants d’établissement où a été identifié un résident COVID-19+, et les résidents contacts de façon large.
  • Entrant en établissement de santé ayant voyagé dans les 15 derniers jours ou ayant eu un contact avec patient COVID-19.

La population des personnes âgées de plus de 70 ans constitue le public le plus vulnérable à l’épidémie de Covid-19 et qui concentre les formes graves et sévères. L’organisation par l’ARS de réponses spécifiques aux personnes âgées en établissements et à domicile représente une priorité dans la gestion de l’épidémie.
Conformément aux préconisations nationales, l’ARS, avec les acteurs du système de soins, met en place une organisation régionale dédiée venant en appui des établissements médico-sociaux prenant en charge des personnes âgées (EHPAD, EHPA, foyers de personnes âgées). Celles-ci doivent bénéficier, comme le reste de la population, du soin approprié à leur état de santé en prenant en compte leurs fragilités particulières et notamment celles liées à l’âge.

Le renforcement de la permanence des soins au bénéfice des établissements et services médico-sociaux

La création d’une astreinte gériatrique au niveau départemental

  • Dédiée aux professionnels de santé des établissements et services médico-sociaux (ESMS) accompagnant des personnes âgées, avec numéro dédié (« hotline ») 7/7 H24.
  • Basée sur les moyens mutualisés des équipes mobiles de gériatrie et d’un pool de 12 gériatres (CHU, GHER, CHOR), répondant aux besoins des EMS en téléexpertise, téléconsultation.
  • Missions :
    • offrir une expertise gériatrique aux professionnels des établissements pour adapter les prises en charge aux mesures de confinement imposées au sein des établissements ;
    • favoriser des discussions collégiales médicales pour la prise en charge d’un cas suspect ou confirmé (au moment de l’apparition du cas, en réévaluation ou en sortie d’hospitalisation) ;
    • mobiliser en tant que de besoin les ressources nécessaires pour la prise en charge des résidents Covid + au sein des établissements hébergeant des personnes âgées.

Le renforcement des astreintes au niveau des territoires

  • une astreinte médicale des médecins coordonnateurs d’EHPAD et/ou libéraux, 7/7 H24 sur les territoires
  • une astreinte infirmière mutualisée 7/7 sur les territoires, avec déplacement dans les établissements si nécessaire.

La mise en place d’un dispositif gradue de prise en charge qui s’adapte a l’évolution de l’épidémie

Dans la phase actuelle :

  • Isolement en EHPAD des cas suspects en attente du résultat de prélèvement fait sur place.
  • Hospitalisation des personnes âgées confirmées Covid+ quelle que soit la gravité par la filière Covid+ des hôpitaux (ceci tant que les lits Covid-19 de 1ère ligne du CHU ne sont pas saturés). A ce jour, les disponibilités de lits Covid+ du CHU permettent ces admissions pour l’ensemble des personnes atteintes y compris sans gravité.

En phase 3 et selon l’importance de l’épidémie :

  • Isolement en EHPAD des cas suspects en attente du résultat de prélèvement fait sur place.
  • Résident atteint de Covid-19, dont le pronostic vital n’est pas en jeu, ne nécessitant pas de soins aigus : transfert vers une unité dédiée Covid Soins de Suite et Réadaptation (SSR) si besoin de soins médicaux, sinon transfert vers une unité dédiée Covid en EHPAD.
  • Résident atteint de Covid-19 en soins palliatifs ou en fin de vie ou pronostic vital jugé péjoratif après évaluation médicale : transfert du résident vers une unité dédiée d’EHPAD, afin de préserver l’EHPAD d’origine.
  • Résident atteint de Covid-19 mettant en jeu son pronostic vital mais pour lequel l’hospitalisation avec une prise en charge raisonnable représente un bénéfice réel : hospitalisation filière Covid+ sans passage par les urgences.

Pour les résidents non atteint de Covid-19 nécessitant une hospitalisation pour une autre pathologie : hospitalisation directe en court séjour gériatrique ou en service spécialisé sans passage par les urgences.

Ce dispositif gradué s’appuie sur la mise en place des structures suivantes :

Les unités de court séjour

Unités de 1ère ligne :

CHU nord, puis CHU sud (réanimation, et unités de médecine Covid-19).

Unités de 2ème ligne :

CHOR, GHER

L’hospitalisation est organisée par le médecin coordonnateur de l’établissement avec le SAMU et l’astreinte gériatrique.

Deux unités SSR personnes âgées, Covid-19+

Une unité de 10 lits dans l’Ouest,

Mise en place par l’IRD, un renfort de personnels pourra être apporté par le CHOR. Activable sans délai.

Une unité de 12 lits dans l’Est,

Mise en place par la clinique de la Paix, extensible à 30 lits si besoin.

Trois unités EHPAD Covid-19+

Ces 3 unités ont vocation à accueillir les résidents Covid+ d’autres établissements permettant ainsi de « protéger » les résidents de l’établissement d’origine :

  • Une unité de 10 ou 12 lits dans l’Ouest : locaux de l’ancien centre hospitalier Gabriel Martin à St Paul, avec les personnels du CHOR, opérationnel mi-avril.
  • Une unité de 10 lits dans le Sud : locaux du Centre de Bois d’Olive de la Fondation Père Favron, à St-Pierre, provisoirement fermés depuis le début de l’épidémie conformément aux directives nationales, et totalement indépendants des autres établissements du site encore en fonctionnement. Cette unité serait susceptible d’accueillir des personnes âgées et si besoin des adultes polyhandicapés Covid+.
  • Une unité de 14 lits dans l’Est : locaux indépendants dans l’EHPAD Village 3ème âge de St André.

Ces unités seront renforcées en moyens infirmiers, avec le support de l’HAD et des équipes de soins palliatifs.

Des sections COVID-19 dans chaque EHPAD

Lorsque l’architecture des locaux le permet, des secteurs pour résidents Covid+ sont individualisés au sein même des établissements.

En parallèle, les établissements intensifient la surveillance des résidents afin de détecter très précocement les premiers signes évocateurs. De plus, la stratégie de dépistage concernera plus largement les résidents et personnels.

  • Une équipe mobile du CHU est à disposition des établissements pour des prélèvements sur place.
  • Certains établissements sont volontaires pour la formation de leurs infirmières et médecins aux techniques de prélèvement, ceci dans l’objectif de limiter les entrées de personnes extérieures (conformément aux mesures de protection).

Dans le cadre de la maladie COVID-19 les anti-inflamatoires non stéroïdiens (AINS), comme l’aspirine ou l’ibuprofène, sont rigoureusement proscrits car la prise de ceux-ci peuvent masquer une infection concomitante pouvant avoir un effet aggravant dans le traitement de la maladie COVID-19.

Le 14 mars 2020,  un avis « DGS URGENT » a été envoyé aux médecins  libéraux relatif à l’utilisation d’AINS chez des patients atteints COVID-19. Celui-ci stipule que :

« Des Evènements Indésirables Graves liés à l’utilisation  des AINS ont été signalés chez des patients atteints du COVID 19, cas possibles ou confirmés. Nous rappelons que le traitement d’une fièvre mal tolérée ou de douleurs dans le cadre du COVID19 ou de toute autre virose respiratoire repose sur le paracétamol, sans dépasser la dose de 60 mg/kg/jour et de 3 g/jour. Les AINS doivent être proscrits. »

Donc seul le paracétamol peut être prescrit pour une forte fièvre dans le cas de la Maladie COVID-19.

Afin de maintenir un stock suffisant de paracétamol pour les malades COVID-19, les spécialités pharmaceutiques  composées de paracétamol sont désormais délivrées dans une limite restreinte pour d’autres maladies, et leur vente par internet interdite.

« Jusqu'au 15 avril 2020, la dispensation par les pharmacies d'officine de spécialités composées exclusivement de paracétamol est, en l'absence d'ordonnance, limitée à deux boîtes pour les patients déclarant présenter des symptômes de type fièvre ou douleurs et une boîte dans les autres cas. Le nombre de boîtes dispensées est inscrit au dossier pharmaceutique nonobstant l'absence d'ordonnance ».

Concernant la continuité de l’accès aux soins, notamment pour le suivi et la prise en charge des patients vivant avec une maladie chronique, il est rappelé le nécessaire maintien

  • des consultations médicales de suivi des patients chroniques, avec recours lorsque cela est pertinent à la téléconsultation, et information du patient et de son entourage, en évaluant la bonne compréhension et l’adhésion aux messages,
  • la réalisation d’examens biologiques indispensables au suivi,
  • la délivrance des médicaments nécessaires au traitement de la maladie : pour les traitements chroniques, le traitement peut faire l’objet d’une délivrance dérogatoire par une pharmacie d’officine pour une période d’un mois supplémentaire, sur présentation de la précédente ordonnance périmée,
  • la poursuite des soins infirmiers même si l’ordonnance est expirée,
  • la poursuite de séances d’éducation thérapeutique du patient, par connexion à distance.

En cas de problème ou d’aggravation de l’état de santé, ou symptômes inhabituels, le degré d’urgence et la conduite à tenir doivent être déterminés par le médecin traitant ou le médecin correspondant habituel. La réalisation de consultations présentielles en cas de phase aigüe de la maladie peut être nécessaire tout en respectant les mesures protégeant les patients du risque infectieux lié à l’épidémie actuelle.

Dans un contexte de confinement, il est important que le médecin traitant ou le médecin spécialiste correspondant habituel prenne contact avec les patients atteints de pathologie chronique les plus fragiles pour s’assurer du suivi et détecter un risque de décompensation de la pathologie. Pour cela, le médecin pourra entrer en contact avec le patient par téléconsultation par vidéo ou par téléphone, et être rémunéré pour cet acte.

En image : visionner la conférence presse du 9 avril 2020